Pierre : Je prends acte qu’il n’y a pas de « moi » pour profiter d’une révélation cosmique puisque le « moi » est une illusion... Mais quand tu affirmes qu’il n’y a pas de révélation cosmique, j’ai une objection. Il se passe bien quelque chose, d’impersonnel certes, à un moment M ! Nous pouvons appeler ça l’Éveil, ce même Éveil qui nous déleste soudain du sac imaginaire de 80 kilos auquel tu faisais référence...
Didier : Il se passe quelque chose, oui. Mais, dans la métaphore très connue, tu te promènes à la tombée de la nuit et un serpent croise ta route. Tu ressens une peur intense, d’où une envie de déguerpir au plus vite. La seconde d’après, tu te rends compte que le serpent n’est en fait qu’une vieille corde abandonnée là, d’où le rire qui éclate et un sentiment de soulagement et de paix qui t’envahit.
Es-tu d’accord que la corde n’a jamais été un serpent, ni avant ni après sa reconnaissance en tant que corde ?
Je sors maintenant de la métaphore. Tu étais en paix dans la petite enfance, tu es à nouveau en paix...
Le cycle de l’Oubli/Éveil est bien inscrit dans le temps mais « ce que tu es vraiment » n’est pas, n’a jamais été et ne sera jamais concerné.
Tu sembles confondre « l’état d’Éveil » – qui n’est d’ailleurs pas un état, c’est notre Essence pour qui rien ne s’est jamais passé – et ce « corps-pensée », objet pour lequel il s’est bien passé quelque chose de l’ordre de la révélation à un moment M.
Cet objet « corps-pensée », va peut-être se sentir concerné par ce moment M, ... jusqu’à M + une seconde !
Par la suite, indépendamment des effets secondaires, il aura du mal à entretenir le concept d’un quelqu’un ayant obtenu quelque chose.
Il y a bien eu un événement central. Mais comment transmettre le message correct et ne pas fourvoyer le «chercheur honnête » sur la piste de « sa » réalisation ? Rappelle-toi, personne n’est jamais réalisé !
Pierre : C’est clair. Passé le moment M, il y a basculement dans le non-duel impersonnel. Et il n’y a dès lors plus personne pour ratiociner, comme je le fais encore en gesticulant dans l’illusion.
De ton côté, au sens propre, tes scrupules t’honorent à ne pas vouloir risquer de « fourvoyer le chercheur honnête ». Quant à «l’Éveil-notre-Essence », peut-être pourrions-nous dire subjectivement « Essence » tout court, puisque celle-ci est immuable. L’Éveil n’est-il pas finalement objectif ?
Didier : Oui bien sûr, ce n’est qu’un objet ! Donc, cet événement « Éveil » est totalement différent d’« Éveil- notre-Essence ».
Ce sont deux mots, deux concepts, l’un pointant vers le subjectif et l’autre vers l’objectif. Je te laisse le soin de deviner lequel est réel !...
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